Vers l’autonomie des autonomistes - 1

Publié le par Herri Spohé

Vers l’autonomie des autonomistes - 1

Nous évoquions dans un précédent billet l’hypothèse souhaitable d’une liste d’union autonomiste, réunissant à la fois l’UDB et Christian Troadec. Nous suggérions en outre qu’elle pourrait déboucher, si tout se passe bien, sur une structure politique durable, sous la forme d’une fédération ou coordination autonomiste/régionaliste bretonne. Nous souhaitons approfondir plus en profondeur cette piste, tant sa réalisation paraît la seule voie réaliste pour faire émerger le régionalisme breton comme force autonome dans le paysage politique breton.

Franchir les 10 %

Lors de l’élection européenne de juin 2014, la liste de Christian Troadec (Nous te ferons Europe !) faisait 7,19 % en Bretagne administrative, et la liste de l’UDB 2,03 %. Ce qui fait 9,24 % à eux deux. C’est le meilleur résultat global, et de loin, jamais enregistré par le mouvement breton, conséquence électorale du mouvement des bonnets rouges de l’automne 2013. Ainsi, le mouvement breton est au seuil des 10 % du corps électoral, condition pour pouvoir se maintenir au second tour lors des élections régionales et donc être en situation de force pour éventuellement fusionner avec une autre liste.

Ce qui sépare Nous te ferons Bretagne et l’UDB n’est pas idéologique : les deux mouvements se situent globalement au centre-gauche, et portent à peu de chose près le même projet d’une Bretagne plus solidaire, plus démocratique et plus forte. Ce qui les oppose ce sont des querelles de personne et des querelles d’organisation. Est-ce que les militants des deux mouvances sauront mettre le projet avant les égos ? Dire que c’est souhaitable est un euphémisme. Cela implique de mettre l’accent sur les apports positifs de chacun et non sur les défauts de l’autre : le dynamisme, le pragmatisme, le charisme et le talent médiatique de Christian Troadec d’un côté, les analyses pertinentes du Peuple breton, le sens de l’organisation, l’abnégation des militants et le réseau de cadres solides de l’UDB de l’autre côté.

Pour une campagne pédagogique

Soyons optimistes et imaginons que la raison l’emportera, que pour une fois les militants bretons n’enclencheront pas la machine à perdre, et que donc une liste de coalition bretonne se lancera à l’assaut du conseil régional. Une fusion des deux mouvances, si elle se fait dans le respect des spécificités de chacun, provoquera une dynamique militante positive, et donc il deviendra tout à fait réaliste d’espérer dépasser les 10 %, d’autant plus que l’élection s’y prête. Ainsi, dans les pays similaires, tels que le Pays de Galles ou la Galice, les autonomistes font leurs meilleurs scores aux élections « régionales ».

Sur quoi baser cette liste ? Clairement, ce sera une liste d’union, de la gauche au centre, mais dont le centre de gravité sera au centre-gauche – en phase donc avec le centre de gravité idéologique des Bretons. Si elle portera avec rigueur et enthousiasme le projet d’une Assemblée de Bretagne, la réunification de la Bretagne et le renforcement de la place des langues de Bretagne dans l’espace public, ce n’est pas avec ça qu’elle gagnera l’élection. L’élection se gagnera sur les questions socio-économiques. Tout l’enjeu sera donc d’expliquer en quoi un renforcement de l’institution régionale (et en quoi envoyer le plus d’autonomistes possibles au conseil régional) permettra d’améliorer concrètement la situation socio-économique et la qualité de vie des Bretons. Il ne s’agit pas de tout réinventer. Les arguments existent déjà dans Le Peuple breton, dans les livres de Jean Ollivro, de Romain Pasquier, des géographes de Bretagne, etc. Mais il s’agira de communiquer dessus de manière concrète. La campagne sera un moment pédagogique pour expliquer tout simplement en quoi une Bretagne autonome sera plus solidaire, plus respectueuse de l’environnement, plus en phase avec les aspirations des habitants, plus propice aux initiatives économiques, plus ouverte sur le monde, etc.

L’Assemblée de Bretagne, de fait, ne doit pas être présentée comme une fin en soi mais comme un moyen pour améliorer démocratiquement la situation bretonne, la vie des Bretonnes et des Bretons. Si la liste de coalition bretonne arrive à faire passer ce message, son ascension sera ensuite irrésistible.

À suivre, la deuxième partie de cette réflexion, sur les raisons, les modalités et le périmètre souhaitable d’une fédération autonomiste bretonne

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